Une gouvernance sans hiérarchie : utopie ou précurseur ?
Les DAOs (Decentralised Autonomous Organisations) reposent sur un principe fondamental : éliminer les couches intermédiaires de management au profit de règles codées dans des smart contracts. Concrètement, chaque membre d’une DAO peut proposer, voter et exécuter des décisions selon des règles préétablies et transparentes.
Ce modèle redistribue profondément le pouvoir décisionnel. Il ne s’agit plus de suivre un organigramme rigide, mais d’imaginer une entreprise fluide, orientée par sa communauté. Dans un monde de plus en plus collaboratif, les DAOs montrent que la hiérarchie n’est plus la seule voie pour organiser le travail.
Réinventer l'engagement organisationnel
La participation active comme moteur d'engagement
Les organisations traditionnelles peinent souvent à mobiliser leurs collaborateurs face à des processus décisionnels centralisés et opaques. L’expérience des DAOs démontre qu’impliquer directement les individus dans les décisions qui les concernent transforme leur relation au travail. Cette participation dépasse la simple consultation pour devenir une véritable co-construction, générant un sentiment d’appropriation (qui peut se traduire par une baisse du turnover et un regain d’innovation).
Neutraliser les jeux politiques
Les frictions internes représentent un coût caché majeur dans les organisations traditionnelles. L’automatisation de règles claires dépersonnalise les décisions sensibles, réduisant les opportunités de favoritisme et canalisant les énergies vers la création de valeur plutôt que vers les manœuvres politiques.
La transparence, levier de confiance
Contrairement aux idées reçues, la transparence légitime l’autorité plutôt qu’elle ne la fragilise. Quand les collaborateurs comprennent les enjeux et contraintes de leur organisation, ils développent une vision systémique qui renforce leur adhésion. Cette ouverture transforme les résistances potentielles en contributions constructives et permet aux équipes de s’autoréguler en alignement avec les objectifs globaux.
Une entreprise gouvernée comme un logiciel
Les DAOs fonctionnent comme des logiciels vivants. Chaque décision, chaque vote est inscrit sur la blockchain et peut être audité à tout moment. Cette traçabilité radicale contraste avec l’opacité de nombreuses décisions dans les entreprises traditionnelles.
Ce modèle « on-chain » ne convient pas à toutes les structures, mais il inspire des évolutions possibles : automatisation des processus, audits transparents, rémunérations décentralisées… autant de pistes à creuser pour moderniser la gestion d’entreprise.
Ce que cela change
Le vote devient action
Dans ce nouveau modèle, le vote dépasse la simple consultation pour devenir un mécanisme d’exécution directe. Chaque décision collective se traduit automatiquement en action concrète. Cette approche restaure la confiance dans les processus participatifs en garantissant que chaque voix compte réellement.
La rémunération repensée et automatisée
Les systèmes de rémunération évoluent vers des modèles transparents et algorithmiques, définis collectivement selon des critères objectifs et évolutifs. Cette codification élimine l’arbitraire des négociations individuelles et permet des ajustements en temps réel basés sur la performance collective et les résultats mesurables. L’équité salariale devient ainsi une réalité technique plutôt qu’un idéal théorique.
L'audit permanent comme nouvelle norme
L’audit traditionnel cède la place à un contrôle continu et intégré. Cette surveillance permanente, rendue possible par l’automatisation, permet une détection précoce des dysfonctionnements et une correction immédiate des écarts. La conformité devient proactive plutôt que réactive.
Ces évolutions convergent vers une organisation plus agile où la gouvernance, la rémunération et le contrôle s’intègrent dans un système cohérent et auto-régulé.
Un modèle imparfait, mais révélateur
Les DAOs ne sont pas exemptes de limites : faible taux de participation, complexité technique, risques de manipulation par des « whales ». Pourtant, elles révèlent une volonté de rupture face aux modèles traditionnels, souvent jugés obsolètes, opaques ou inadaptés à l’ère numérique.
Elles servent aujourd’hui de laboratoire à ciel ouvert pour expérimenter d’autres manières de travailler : plus horizontales, plus agiles, plus collectives.
Vers un futur hybride ?
Les entreprises du futur ne seront pas toutes des DAOs. Mais elles pourraient en adopter certaines briques. Voyons quelques exemples de ponts possibles.
- Gouvernance participative : donner davantage de pouvoir de décision aux équipes terrain, avec des outils de vote digital
- Trésorerie transparente : ouvrir les flux financiers internes à plus de contrôle et de visibilité pour les collaborateurs.
- Rémunération collective : explorer les modèles de rémunération basés sur des critères partagés et évolutifs.
Conclusion – Réapprendre à faire entreprise
Les DAOs nous montrent qu’une autre voie est possible. En mêlant transparence, autonomie et technologie, elles nous obligent à réinterroger nos certitudes sur l’entreprise.
Le futur ne sera peut-être pas 100% décentralisé, mais il sera certainement plus ouvert, plus participatif, plus adaptable. Et si la DAO n’était pas un modèle à copier, mais une boussole pour se réinventer ?
