Avec la montée en puissance de l’intelligence artificielle et des bots automatisés, la frontière entre activité humaine et activité générée par des machines devient de plus en plus floue. Sur la blockchain, ce problème prend une dimension encore plus critique. Les bots sont capables de participer à des votes dans des DAO, de manipuler des airdrops ou encore d’exploiter des failles économiques dans des protocoles DeFi.
Face à cette menace, un concept émerge : le Proof-of-Personhood. Son objectif est simple en apparence, mais complexe dans la mise en œuvre : garantir qu’une adresse blockchain correspond bien à une personne réelle et unique.
Qu’est-ce que le Proof-of-Personhood ?
Le Proof-of-Personhood (PoP) est une approche visant à prouver l’humanité d’un utilisateur, sans révéler son identité réelle. Contrairement à la vérification classique via carte d’identité ou passeport, il cherche à établir un équilibre entre confidentialité et unicité. Autrement dit, vous n’êtes pas obligé de dire qui vous êtes, mais vous devez prouver que vous êtes un être humain unique.
Différentes méthodes ont été explorées pour atteindre ce résultat. Certaines reposent sur des interactions physiques, comme la vérification biométrique ou la participation à des événements réels. D’autres privilégient les preuves cryptographiques, avec des technologies comme les Zero-Knowledge Proofs (ZK Proofs) qui permettent de prouver une information (être humain et unique) sans révéler les données sous-jacentes.
Les premiers projets et expérimentations

Plusieurs projets blockchain ont déjà tenté d’intégrer une forme de Proof-of-Personhood. Le plus connu reste Worldcoin, lancé par Sam Altman (OpenAI). Ce projet utilise un appareil appelé Orb pour scanner l’iris des utilisateurs et générer une identité numérique unique. L’idée est d’éviter les doublons et de garantir que chaque humain ne dispose que d’une seule identité sur le réseau.
Cependant, cette approche soulève des débats intenses sur la confidentialité et la centralisation. D’autres initiatives plus décentralisées cherchent des alternatives. Par exemple, certains protocoles expérimentent avec des systèmes d’attestation communautaire, où l’humanité d’un individu est validée par d’autres humains déjà reconnus, un peu comme un réseau de confiance distribué.
Les enjeux pour la blockchain et la société
Le Proof-of-Personhood pourrait devenir une brique essentielle de l’écosystème blockchain. Dans la gouvernance décentralisée, il permettrait de s’assurer que chaque vote provient d’une personne réelle et non d’un bot contrôlant des milliers d’adresses. Dans la DeFi, il pourrait limiter les abus liés aux airdrops ou aux mécanismes d’incitation. Plus largement, il pourrait ouvrir la voie à une nouvelle forme d’identité numérique universelle, respectueuse de la vie privée.
Mais le chemin est semé d’embûches. Comment concilier la nécessité de prouver son humanité avec le respect total de l’anonymat ? Comment éviter la centralisation des données biométriques dans les mains de quelques entreprises ? Ces questions sont encore loin d’avoir trouvé une réponse définitive.
Une technologie encore en quête d’équilibre
Le Proof-of-Personhood est à la croisée des chemins. D’un côté, il offre une solution prometteuse pour redonner confiance dans les interactions numériques et limiter les dérives liées aux bots. De l’autre, il pose des dilemmes éthiques et techniques qui nécessitent une approche collective, transparente et respectueuse des droits fondamentaux.
À mesure que la blockchain et l’intelligence artificielle s’entrelacent, la capacité à distinguer l’humain de la machine deviendra cruciale. Le Proof-of-Personhood pourrait bien être la clé pour construire un Internet décentralisé où la confiance ne dépend plus d’institutions centrales, mais d’une preuve universelle de notre humanité.